Les analyses de médecins du travail présentées dans ce livre donnent la mesure de l'ampleur des dégâts sur la santé des salariés provoqués par la précarisation des emplois, l'intensification du travail ou la violence des rapports sociaux dans les entreprises. Ce constat collectif confirme, hélas, le bilan déjà dressé en 1993 dans Souffrances et précarités au travail - Paroles de médecins du travail ( éditions Syros), précédent ouvrage de l'association "Santé et médecine du travail".

     D'où la nécessité de dépasser ce constat pour comprendre ce qui conduit tant les salariés à taire leurs souffrances physiques ou psychiques, au risque de leur santé et de leur vie sociale, et ce qui incite certains employeurs à utiliser cette douleur et à éliminer "ceux qui ne tiennent pas le coup". Pour comprendre, enfin, pourquoi la médecien du travail reste l'affaire des entreprises, à l'écart des questions de santé publique.

     Les auteurs de celivre invitent donc résolument à repenser le rôle de la médecine du travail. D'abord parce que ceux qui l'exercent sont de plus en plus instrumentalisés par les employeurs : incontestablement, une médecine d'"entreprise" subordonnant l'exercice médical aux objectifs économiques, au mépris des acquis de la loi sur la médecine du travail de 1946, progresse de façon larvée. Ensuite parce que le médecin du travail ne peut plus seulement s'intéresser aux maladies organiques : son métier doit aussi appréhender la dimension psychologique de la santé des salariés et en situer les enjeux en matière de santé publique.

     Dans cette perspective, les médecins du travail qui ont rédigé ce livre explorent les solutions qui permettraient de garantir concrètement l'indépendance des médecins du travail, notamment en retirant la gestion de la médecine du travail aux employeurs. Une responsabilité qui les conduit à débattre des conséquences éthiques, sociales et scientifiques de leurs pratiques.
 


haut de page
accueil